Au cours de la dernière édition de Laval Virtual, l’AREA a organisé une table ronde sur l’utilisation de la réalité augmentée afin d’améliorer la productivité dans l’industrie. Le sujet est vaste mais Olivier Larroque (Ingénieur logiciel) a sélectionné pour vous les réflexions les plus intéressantes de cette rencontre.
Les participants à cette table ronde étaient Christine Perey de THE AREA, Manuel Asselot (Robocortex), Sebastian Knödel (DIOTA), Marie-Julie Pecoult (Diginext), Pontus Blomberg (3D Studio Blomberg) et Jim Novack (Talent Swarm).
Quelle est l’industrie en pointe sur la RA actuellement en Europe ?
L’aérospatiale est l’industrie leader, poussée par la réutilisation de tout le contenu 3D de sa gestion du cycle des produits (PLM ou Product Lifecycle Management). Beaucoup de cas d’usage existent pour pallier au manque d’expérience, assister lors d’opérations risquées ou complexes et méritent de s’y pencher étant donné qu’une seule erreur sur les chaînes de montage peut entraîner la perte d’un satellite ou d’un avion.
Que recommandez vous pour trouver un cas d’utilisation concret où les industriels sont prêts à investir ?
Idéalement, il faut identifier les points critiques de l’industriel à savoir où les erreurs humaines engendrent le plus grand coût possible.
Le ROI (retour sur investissement) de la RA avec quelques expériences comme celles de Boeing et de Newport News Shipbuilding justifie à lui seul le fait pour un industriel de se lancer dans un tel projet.
Boeing a effectué une comparaison sur une succession de 50 étapes de montage avec différents procédés : à l’aide d’instructions sur un pc fixe, en ayant les instructions sur tablette via PDF et enfin en superposant par réalité augmentée les instructions au montage.
Les résultats sont édifiants: avec des personnes n’ayant aucune connaissance préalable du montage à faire, ceux à l’aide du dispositif de réalité augmentée n’ont commis qu’une erreur là où ceux qui possédaient le pc fixe en ont commis 8 au premier montage. Au deuxième montage, plus aucune erreur à l’aide de la tablette utilisant la RA !
Lien vers le Téléchargement du PDF du use case.
Quels pré-requis conseillez vous pour des industriels voulant se lancer dans la RA ?
Plus que des blocs technologiques, c’est l’optimisation du contenu 3D existant pour s’adapter à la rapidité de progression des technologies de la RA qui est un pré-requis. Être flexible et modulaire dans son approche de façon à pouvoir passer d’un matériel à un autre ou d’un logiciel à un autre assure de toujours rester en avance sur le marché.
Que pensez-vous des lunettes de réalité augmentée ?
La première étape dans l’adoption de la réalité augmentée est de passer par un support tablette pour éprouver la technologie puis de migrer vers des smartglasses si nécessaire.
Les smartglasses peuvent être attirantes (contrôle sans les mains, portabilité, etc …), mais il faut éviter de tomber dans le “shiny object syndrom”, l’envie d’utiliser à tout prix un nouveau matériel sans étudier tous ses tenants et aboutissants. Il importe de regarder les apports réels et les limites techniques des différents matériels .
En tant qu’innovation disruptive, qu’implique l’adoption de la RA ?
- Une certaine résistance sociale face au changement: Les syndicats ou conservateurs au sein de l’entreprise peuvent être réticents au changement si la RA est perçue comme la robotique. La communication doit s’orienter sur l’assistance à l’humain dans ce qu’il sait faire de mieux et remettre l’humain au coeur des débats.
- Dématérialisation des procédures: Dématérialiser et visualiser du contenu qui est encore parfois sur de simples classeurs ou manuels. La RA tire partie de notre traitement visuel et tend à s’appliquer de façon instinctive par les opérateurs en minimisant les erreurs par superposition des instructions à suivre en temps réel.
- Faire face aux réalités technologiques : Beaucoup de vidéos débordantes d’effets spéciaux ont installé des attentes élevées concernant la RA. Cependant il faut faire face aux limites du matériel (champ de vision, tracking, etc… ) et du logiciel . Testez et éprouvez les technologies pour les faire correspondre à votre cas d’usage !
Quand faut-il se lancer ? Faut-il attendre le meilleur hardware ?
Idéalement, tout de suite, l’adoption de la RA est un processus long avec beaucoup d’aspects (social, sécurité, etc…) ce qui implique de lancer un projet collaboratif où tous les secteurs de l’entreprise sont impliqués (opérationnel, management, juridique, IT, etc …)
En conclusion ?
La RA va nous permettre d’approcher notre manière de penser plus visuellement, en nous offrant une nouvelle manière de représenter des objets, apprendre des procédures et transmettre des connaissances. On ne peut que se réjouir quand on voit le progrès fait entre le premier écran MS-DOS et les nouveaux dispositifs actuels comme Hololens, DAQRI Helmet ou Magic Leap.
Mon point de vue (Olivier Laroque)
L’approche via une table ronde d’acteurs divers, mais pourtant s’accordant la plupart du temps sur le même avis, m’a parue intéressante. Les participants étaient tous passionnés par la RA et ses impacts mais apparaissaient avant tout réalistes sur le chemin restant avant l’adoption d’une technologie aussi disruptive.
Grégory MAUBON est consultant indépendant en réalité augmentée (animateur et conférencier) depuis 2008, où il a créé www.augmented-reality.fr et fondé en 2010 RA'pro (l'association francophone de promotion de la réalité augmentée). Il a aidé de nombreuses entreprises (dans plusieurs domaines) à définir précisément leurs besoins en réalité augmentée et les a accompagnées dans la mise en œuvre.