La réalité augmentée, un atout majeur pour lutter contre le changement climatique ?

Le changement climatique représente un défi majeur pour notre planète, et il est crucial de trouver des solutions innovantes pour y faire face. Lors de la dernière édition de Laval Virtual, un échange passionnant a été organisé entre Lorraine de Montenay (collaboratrice du collectif GreenIT) et David NAHON (représentant du CNXR) sur le sujet de la durabilité et de la XR. Cette discussion nous a permis de comprendre que la question est particulièrement complexe même si quelques rapports commencent à nous donner des pistes comme l’étude ADEME – Arcep sur l’impact environnemental du numérique en France ou l’analyse du cycle de vie des équipements numériques.

Sur cette question, la réalité augmentée apporte des solutions prometteuses. Dans cet article, nous avons voulu en lister quelques-unes dans différents domaines. Malheureusement, nous n’apporterons pas d’éléments sur l’impact du matériel ou sur les consommations des différentes applications, ce qui ne nous permettra pas de statuer dans l’absolu sur les usages présentés. Cependant, c’est un premier pas …

After Ice

La sensibilisation au changement climatique est évidement primordial et il existe aujourd’hui de nombreux projets utilisant la réalité augmentée pour aider les personnes à visualiser concrètement les conséquences. L’application « After Ice » (2018), par exemple, permet aux utilisateurs de visualiser les effets de la fonte des glaces et de la montée des eaux dans leur environnement local. À l’initiative de l’artiste Justin Brice, cette application propose plusieurs scénarios qui s’appuient sur les études scientifiques de la NASA. Récemment, nous vous avons parlé ici de l’application Carbon Detox de XR+, sélectionnée par le XR Prize Challenge de AWE, et qui propose aux personnes de « voir » leurs émissions de CO2 et propose des pistes pour les réduire.

Dans la construction, la réalité augmentée peut être utilisée pour limiter les déchets de construction en optimisant les processus. Plusieurs expériences ont été mises en place sur des chantiers comme ceux de Trimble en Irelande ou de McKinstry et Spectar. Les gains dépendent évidement des types de chantier, mais des chiffres d’une étude de l’Université de Cambridge montre une réduction moyenne de 15% dans le gaspillage de matériaux.

L’application « Shariiing for You » de Immersion

La réalité augmentée permet également de limiter la consommation d’énergie. Le cas le plus emblématique est l’utilisation des outils d’ « expertise à distance » qui permettre à un expert de ne pas se déplacer sur le terrain pour assister un opérateur. L’entreprise française Immersion par exemple propose depuis quelques années l’outil « Shariiing for You ». Lorsqu’un technicien rencontre un problème sur site, il peut utiliser une tablette, un smartphone ou des lunettes de réalité augmentée pour partager son environnement avec un expert à distance. L’expert peut alors voir ce que le technicien voit et utiliser des annotations en réalité augmentée pour guider la résolution du problème. Les annotations peuvent inclure des dessins, des flèches ou des instructions textuelles qui apparaissent directement sur l’écran du technicien et se superposent à l’environnement réel. Il existe aujourd’hui de nombreux prestataires offrant ce type de solutions comme ScopeAR, Teamviewer Assist AR, Spectral TMS, ou le service Microsoft Dynamics 365 Remote Assist. Le gain en termes de déplacement est évidement, et la réduction de l’impact environnemental est couplé à une réduction des coûts associés.

L’application de Gypass vous aide à choisir votre portail sans portail !

Dans notre vie quotidienne également, la réalité augmentée peut contribuer à changer nos comportements pour réduire notre impact. Les nombreuses solutions d’ « essayage virtuel » dans des domaines aussi différents que les lunettes, le maquillage, les bijoux, les meubles, les portes de garages ou les vérandas. Dans tous les cas, ces applications limitent les déplacements (des clients et des objets) comme dans les cas précédents. Inutile par exemple de multiplier les commandes et les retours, un gain direct sur les émissions de CO2 dues à la logistique. Mais, en plus, la réalité augmentée ne nécessite pas de matérialiser les objets. On peut donc choisir sans fabriquer, être certain de faire le bon choix, puis utiliser la bonne quantité de matière et d’énergie pour produire « juste ce qu’il faut’.

Le domaine de la mode est un cas particulier des usages B2C où la réalité augmentée peut jouer un rôle. En effet, on connaît l’impact particulièrement important de cette industrie, en particulier de la « fast fashion », sur l’environnement. Au-delà de l’essayage et de la sensibilisation du circuit de conception vertueux, l’utilisation de la réalité augmentée peut répondre à ce besoin de nouveauté en modifiant virtuellement l’aspect des vêtements. C’est ce type de produits que propose l’entreprise française Amsofree. Nous sommes encore au tout début de ce type d’utilisation, mais avec la disponibilité des appareils de visualisation personnels, nous pourrions voir émerger un nouveau secteur de la mode virtuelle, à l’image de celui qui se développe en réalité virtuelle.

La mode en réalité augmentée chez Amsofree

Nous devons également dans cette liste d’usages mettre l’accent sur la partie formation qui combine tous les avantages cités précédemment. En proposant des expériences d’apprentissage immersives et interactives, la réalité augmentée permet aux apprenants d’acquérir des compétences pratiques sans la nécessité de se déplacer sur des sites spécifiques pour des formations en présentiel, réduisant ainsi les émissions de carbone liées aux transports. Dans cette interview, par exemple, Stéphane Legrand nous présentait en 2021 la formation incendie XR Fire Trainer qui permet une utilisation sur place, sans avoir besoin de déplacer une équipe dans un lieu dédié.

Formation à la soudure par Soldamatic

De plus, les formations basées sur la réalité augmentée diminuent la consommation de matières premières, souvent nécessaires lors des formations traditionnelles pour les exercices pratiques. Par exemple, dans le domaine de la soudure, la réalité augmentée permet aux apprentis soudeurs de pratiquer leurs techniques sans utiliser de matériaux réels, réduisant ainsi la consommation de métal et de gaz. La société Soldamatic a développé un simulateur de soudage en réalité augmentée qui permet aux apprentis soudeurs de s’entraîner sans gaspiller de ressources.

En conclusion, l’utilisation de la réalité augmentée représente une opportunité prometteuse pour lutter contre le changement climatique et réduire l’impact environnemental des différents secteurs de l’économie. Il est toutefois important de souligner que le coût environnemental des logiciels et des matériels de réalité augmentée reste à évaluer. Le développement, la fabrication et l’utilisation de ces outils consomment de l’énergie et des ressources, et il faudra en tenir compte dans l’évaluation globale de leur impact.

Malgré ces considérations, les bénéfices potentiels de la réalité augmentée en matière de durabilité semblent significatifs. En adoptant et en intégrant la réalité augmentée dans les pratiques commerciales et les comportements des consommateurs, nous pouvons espérer une réduction de l’empreinte écologique et à une meilleure préservation de notre planète.

AR consultant & RA'pro president à GMC | Site Web | Plus de publications

Grégory MAUBON est consultant indépendant en réalité augmentée (animateur et conférencier) depuis 2008, où il a créé www.augmented-reality.fr et fondé en 2010 RA'pro (l'association francophone de promotion de la réalité augmentée). Il a aidé de nombreuses entreprises (dans plusieurs domaines) à définir précisément leurs besoins en réalité augmentée et les a accompagnées dans la mise en œuvre.

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